Amélioration notable en surface
Les pluies du printemps ont bien évidemment eu un effet bénéfique sur les sols en surface. Il suffit de comparer la carte des zones touchées par la sécheresse (en orange) entre la fin février et la fin avril pour constater que le déficit d’humidité des sols s’est considérablement restreint en France, reculant surtout en direction des Pyrénées et des régions méditerranéennes.
À 8 jours de la fin du printemps météorologique, l’indice d’humidité des sols en surface est repassé au dessus de la normale sur une grande partie de la France (la Méditerranée reste souvent en déficit). Certaines régions ont même des sols gorgés en eau grâce aux pluies copieuses observées depuis mars. Ci-dessous, des champs saturés en eau dans le nord du département de l’Aisne en Picardie durant la première quinzaine de mai. Mais alors, pourquoi parle-t-on encore de sécheresse ? Retenez bien la notion de sols en surface…
Sécheresse agricole ≠ sécheresse des nappes
Alors, la sécheresse est terminée puisqu’il a plu durant ce printemps ? Pas vraiment… Cette réflexion que l’on lit très souvent sur les réseaux sociaux est bien trop simpliste. Il est primordial de différencier la sécheresse agricole (ou sécheresse de surface) de la sécheresse des nappes, car les deux ne sont pas liées aussi directement qu’on ne le pense. Il ne suffit pas qu’il pleuve pour que les nappes phréatiques se remplissent immédiatement. D’ailleurs, 68% des nappes du pays affichaient encore des niveaux déficitaires au 1er mai dernier.
Mais alors, pourquoi l’amélioration est-elle si lente au niveau des nappes ? Lorsqu’il pleut, le sol est immédiatement humidifié en surface. En revanche, le chemin de l’eau de pluie vers les nappes peut être long car l’eau doit traverser des roches plus ou moins poreuses. Cela peut parfois prendre plusieurs semaines à plusieurs mois, en fonction de la composition du sol. Si certaines nappes réagissent assez rapidement aux pluies, d’autres prennent beaucoup de temps. Il est donc important de comprendre que l’alimentation en eau de pluie des nappes phréatique est soumise à une forte inertie.
La pluie est arrivée trop tard
Il existe également un autre facteur clé qui accentue la différence entre l’humidité des sols en surface et le niveau des nappes souterraines : la saisonnalité. En effet, c’est principalement en automne et en hiver que les nappes phréatiques se rechargent. La raison ? Une fois le printemps arrivé, la végétation se réveille et voit ses besoins en eau exploser. Ainsi, une grande partie de l’eau de pluie est puisée par les racines et ne peut s’infiltrer en profondeur vers les nappes. De plus, la hausse des températures vient favoriser l’évaporation de l’eau en surface.
Après un hiver bien trop peu arrosé, les nappes phréatiques n’ont pas pu se remplir suffisamment, d’autant qu’elles partaient de niveaux déjà bien trop bas après la sécheresse de 2022. Les pluies de ce printemps arrivent donc trop tard car la végétation en puise une grande partie. Cela règle la sécheresse agricole mais pas celle des nappes. Pour ne rien arranger, la profondeur des nappes augmente au printemps et en été. Non seulement l’eau de pluie est captée par la végétation mais elle doit aussi s’enfoncer bien plus profondément pour atteindre la nappe, rendant le remplissage très difficile à la saison chaude.
L’été n’est pas encore là
Si ce printemps aura eu le mérite d’améliorer considérablement la situation en surface, gardons donc à l’esprit que les deux tiers des nappes phréatiques du pays sont toujours trop basses. Par ailleurs, n’oublions pas que l’été est toujours devant nous et qu’en cas de nouvelles périodes sèches prolongées, une aggravation de la situation pourrait survenir. À ce sujet, les 2/3 nord de la France semblent entrer dans une longue période anticyclonique et sèche en flux de nord-est. Les sols – actuellement humides – devraient s’assécher et revenir assez vite à des niveaux normaux d’ici début juin.